Le Sénégal et la Guinée-Bissau viennent de signer un nouveau protocole d’accord sur la pêche artisanale, ce 17 juin, garantissant un cadre sécurisé pour les pêcheurs artisanaux dans les eaux bissau-guinéennes.
Le Président de la République, Bassirou Diomaye Diakhar FAYE, effectue une visite, ce jeudi 22 mai 2025, sur la Plateforme du projet gazier offshore Grand Tortue Ahmeyim (GTA). Le Chef de l’Etat sénégalais sera en compagnie de son homologue Mohamed Ould Cheikh El GHAZOUANI, Président de la République islamique de Mauritanie.
Le 5 juin marque la Journée internationale de lutte contre la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN). Derrière cet acronyme se cache un fléau mondial qui détruit les écosystèmes marins, fragilise la sécurité alimentaire et condamne des millions de familles à la précarité. Le Sénégal, pays côtier par excellence, figure parmi les nations les plus durement touchées.
Selon les données de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), la pêche INN représente entre 11 et 26 millions de tonnes de poissons capturés chaque année, soit environ 15 % des captures mondiales. Cette pêche illégale génère des pertes économiques estimées entre 10 et 23 milliards de dollars par an, soit l'équivalent de 6 000 à 13 800 milliards de francs CFA.
Le Sénégal, une victime à ciel ouvert Au Sénégal, les conséquences sont dramatiques. Dans un article publié par Actusen en 2024, les autorités sénégalaises des Pêches estimait que le pays perd chaque année environ 150 milliards de francs CFA à cause de la pêche INN. Cette situation est due à l’opacité dans l’attribution des licences, à la corruption, à l’absence de traçabilité et au manque de moyens de surveillance en mer. Entre janvier et juillet 2023, 24 navires ont été arraisonnés dans les eaux sénégalaises pour infractions liées à la pêche illégale, comme l’a confirmé un haut responsable de la Direction de la protection et de la surveillance des pêches dans une déclaration à l’Agence de presse sénégalaise (APS).
Une menace sur la sécurité alimentaire et l’emploi
La pêche INN provoque une surexploitation de certaines espèces clés, comme les sardinelles, un poisson fondamental dans l’alimentation des populations d’Afrique de l’Ouest. Dans une enquête publiée par Le Monde Afrique en mai 2024, des chercheurs alertent sur la raréfaction inquiétante de ces espèces à cause des pratiques illégales dans les eaux sénégalaises. Sur le plan social, la pêche illégale prive des milliers de pêcheurs artisanaux et leurs familles de leurs moyens de subsistance, accentuant l’exode rural et la pression migratoire.
Elle génère également des flux financiers illicites, comme le souligne la Confédération africaine des organisations de pêche artisanale (CAOPA), qui accuse certaines flottes étrangères de dissimuler leurs revenus et d’alimenter la corruption locale. Des mesures encore insuffisantes Le Sénégal a certes enrichi son arsenal juridique. Selon le ministère des Pêches, les nouvelles sanctions peuvent aller jusqu’à 1 milliard de francs CFA d’amende et la confiscation du navire en cas de récidive.
Le pays a également renforcé ses capacités de surveillance, notamment avec l’acquisition d’avions et de patrouilleurs. Mais ces efforts restent insuffisants face à l’ampleur du problème. La coordination régionale et la transparence dans la gestion des ressources marines demeurent les maillons faibles d’une lutte encore trop timide.
Rupture des accords de pêche, un tournant ?
La non-reconduction de l’accord de pêche entre le Sénégal et l’Union européenne, effective depuis le 17 novembre 2024, marque un tournant significatif. Bien que motivée officiellement par des « défaillances » du Sénégal dans la lutte contre la pêche INN, cette décision est perçue par de nombreux acteurs locaux comme une opportunité de reprendre le contrôle sur les ressources halieutiques nationales.
Aliou Ba, responsable de la campagne Océans à Greenpeace Afrique, souligne : « Si l'on parle de pêche INN, l'UE elle-même fait partie des acteurs de cette pêche ! Le merlu étant en état de surexploitation, l'UE ne devrait même pas signer d'accord pour cette ressource. Leurs thoniers et la pêche juvénile pratiqués par les navires européens ne respectaient pas non plus la réglementation. »
Entre 2019 et 2024, l’accord avait permis aux navires européens de capturer environ 10 000 tonnes de thonidés et 1 750 tonnes de merlu par an, en échange d’une contribution financière de 8,5 millions d’euros (environ 5,5 milliards de francs CFA) au Sénégal. La fin de cet accord pourrait ainsi réduire la pression exercée par les flottes industrielles étrangères, souvent critiquées pour leurs pratiques non durables, et offrir au Sénégal l’opportunité de renforcer ses mécanismes de surveillance et de gestion des ressources halieutiques.
Un appel à la mobilisation
À l’occasion de cette Journée internationale, la société civile, les États et les institutions internationales sont appelés à renforcer leur coopération pour éradiquer la pêche INN. La survie des océans et de millions de vies humaines en dépend. « L’océan ne peut pas parler, mais il souffre.
La pêche illégale, c’est un vol organisé contre l’humanité. » Pape Sagna Mbaye, ancien ministre sénégalais des Pêches.